Archives de la catégorie: Opinion

Opinion Scène québécoise

Projet Montréal

Peut-être aurez-vous la chance de voir cette vidéo avant les élections du 1er novembre. Ou peut-être regretterez-vous de ne pas l’avoir visionnée avant les élections.
La crise économique généralisée met en relief les gaspillages, la spéculation éhontée, la corruption politique qui illustrent le comportement des représentants de l’establishment politique. En traitant la nouvelle, les médias cherchent des coupables, des individus à qui faire porter la responsabilité, comme s’il s’agissait d’un accident de parcours dû à des poliitciens véreux. On pratique ni plus ni moins du populisme journalistique, une manière de traiter la nouvelle en surface seulement et d’éviter les questions de fonds et surtout de passer sous silence les enjeux fondamentaux. Voilà pourquoi il est rarement question des véritables solutions de rechange.
Connaissez-vous vraiment Projet Montréal ? Aviez-vous déjà entendu parler de Richard Bergeron ? Et surtout saviez-vous que Projet Montréal était un vrai parti de citoyens et citoyennes qui militent depuis le début des années 2000 pour démontrer qu’un autre Montréal est possible. Ce sont en bonne partie ces gens que Louise Harel traitait ni plus ni moins d’hurluberlus lorsqu’ils ont contribué à l’élection d’Amir Khadir aux élections provinciales. Des citoyens et des citoyennes qui nous montrent enfin qu’une autre manière de faire la politique au Québec était possible. Des gens pour qui le mot changement n’a pas qu’une signification électoraliste.

À voir : La fin du néandertal

Opinion Scène canadienne

L’ACIMMO entre en vigueur

Hélas, l’entrée en vigueur de l’ACIMMO le premier avril 2009 n’était pas un poisson d’avril. L’ACIMMO (Accord sur le commerce intérieur et la mobilité de la main d’oeuvre – TILMA en anglais, pour Trade Investment and Mobility Agreement) contient les plus récentes modifications à l’ACI (l’Accord sur le commerce intérieur) adopté initialement en 1995, dans le but d’adapter les politiques d’échanges inter-provinciales au Canada, à l’Accord de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Adapter au niveau des principes s’entend, car rien dans l’ALÉNA (Accord de libre-échange nord-américain) n’oblige les provinces canadiennes à modifier leurs relations commerciales entre elles.

Il s’agit en effet d’un accord qui vient appuyer le principe de la suprématie du commerce et du «libre-marché» sur les législations en vigueur dans les provinces canadiennes, une suprématie qui est loin d’être purement théorique puisqu’en cas de litige ce sont les tribunaux commerciaux qui seront appelés à trancher. À l’image du Chapitre 11 de l’ALÉNA que le Canada prétendait vouloir réviser, cela signifie que les différentes législations pourraient être appelées à modifier leurs lois et règlements en conséquence ou se préparer à payer de lourds dédommagements, pouvant atteindre, pour le moment, jusqu’à 5 millions de dollars.

Est-il nécessaire de rappeler qu’en vertu du Chapitre 11 de l’ALÉNA, à deux reprises le gouvernement canadien a dû modifier ses législations, sans parler des dédommagements financiers aux entreprises.

« En 1996, le gouvernement du Canada approuve une loi abolissant l’utilisation du MMT, un additif ajouté à l’essence qui pourrait contenir une neurotoxine causant des dommages au cerveau. L’Ethyl Corporation, distributeur américain de l’additif, réplique en utilisant la réglementation de l’ALÉNA et poursuit le Gouvernement pour 347 millions $, affirmant subir une expropriation et une perte de profits. Le procès se termina en 1998 lorsque le Gouvernement fit un jugement hors cour, donnant 20 millions $ à Ethyl Corporation, lui soumettant des excuses par le biais d’une lettre » (Sources : Eric Squire)

Le 20 octobre 2002, le Panel d’arbitres formé pour régler les litiges commerciaux dans le cadre de l’Accord sur le libre-échange avec les États-Unis rendait une autre décision défavorable au Canada. Celui-ci dut verser une somme de 6,05 millions de dollars à la Compagnie S.D. Myers qui contestait la loi de 1995 interdisant l’exportation canadienne de BPC aux États-Unis. Dans sa défense le gouvernement canadien disait vouloir se conformer à la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux, dont il était signataire.

Dans les deux cas précités, le gouvernement canadien dut par la suite modifier sa législation pour satisfaire les exigences des compagnies à l’origine des poursuites.

Une autre poursuite contre le gouvernement de Colombie-Britannique. Sun Belt Inc., une entreprise californienne réclamait 468 millions $ US parce que la Colombie-Britannique lui a retiré son permis d’exportation d’eau. La plainte fut retirée lorsque la compagnie fut incapable de fournir les garanties financières exigées pour la poursuite de la cause.

À l’instar du Chapitre 11 de l’ALÉNA, l’ACIMMO a déjà commencé ses ravages. Ratifiés depuis 2006, les accords sur le commerce intérieur entre la Colombie-Britannique et l’Alberta ont déjà eu leur impact sur les normes du travail. : « En décembre 2007, le gouvernement de la C.-B. et l’ordre provincial des enseignants ont du signer un accord de mobilité des enseignants dans le cadre de l’ACIMMO. L’entente « harmonise » les normes relatives aux enseignants de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, en faveur des exigences de l’Alberta. Le programme de la Colombie-Britannique est passé de quatre à trois ans et impose désormais moins de cours pour l’obtention de la certification d’enseignant », un nivellement par le bas.

Selon Steven Shrybman, un avocat spécialisé en droit commercial, un projet contre la malbouffe dans les écoles de Colombie-Britannique pourrait être contesté en vertu de l’ACIMMO du fait qu’il restreint l’investissement.

Selon une analyse du SCFP (Syndicat canadien de la fonction publique) « Un conseiller municipal de Turner Valley, en Alberta, a proposé l’interdiction du polystyrène à base de pétrole et non recyclable utilisé dans des produits comme les tasses jetables, les contenants de nourriture et le matériel d’expédition. Cette mesure de protection de l’environnement pourrait être jugée illégale en vertu de l’article 9 (4a) de l’ACIMMO, qui stipule que pendant la transition vers l’application complète de l’ACIMMO aux municipalités en avril 2009, aucun règlement ne peut être modifié de façon à le rendre plus contraignant pour l’investissement ».

Hier, le 2 avril, le Collège des médecins du Québec et le Collège des médecins et chirurgiens de l’Ontario, selon newswire.ca, « ont signé un accord historique qui favorise la mobilité de la main-d’oeuvre médicale entre les deux provinces. Cette entente donne la possibilité à un médecin titulaire au Québec d’un permis sans limitation et sans restriction d’obtenir automatiquement un permis d’exercice pour pratiquer la médecine en Ontario et à un médecin titulaire d’un permis sans limitation et sans restriction en Ontario d’avoir un permis d’exercice pour venir travailler en sol québécois. Les deux ordres professionnels sont parvenus rapidement à cet accord sur la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles des médecins afin de répondre à une commande en ce sens provenant des deux gouvernements provinciaux et à l’esprit des modifications du chapitre VII de l’Accord sur le commerce intérieur (ACI), en vigueur depuis hier, le 1er avril 2009 ». Cela fait craindre pour la FMSQ (Fédération des médecins spécialistes du Québec) un exode massif des médecins spécialisés (et formés à grands frais par le Québec) vers l’Ontario où les salaires sont plus élevés.

Dans la foulée des politiques de mondialisation et de dérèglementation à outrance, les gouvernements Harper et Charest qui soutiennent à fond de train l’ACIMMO et l’économie dit de «libre-marché» démontrent une fois de plus qu’ils ne retiennent aucune leçon de la crise financière et économique actuelle. Mieux, ils démontrent que leurs gouvernements ont toujours à coeur de faire passer les intérêts des grandes entreprises avant ceux des populations qui les ont élues.

À lire sur le sujet :
Sur TILMA
Sur la mobilité de la main d’oeuvre
Portrait de la situation

Opinion

Les utopies d’une certaine gauche face à la crise

La religion nous avait déjà habitués à des attitudes défaitistes par rapport au progrès. Elle tenait un discours essentiellement individualiste et spiritualiste. S’associant ici et là à des causes où l’exploitation et la misère atteignaient des formes extrêmes, l’essentiel du discours de l’Église affirmait que le véritable refuge de l’humanité se trouvait dans la prière et dans cette croyance que le paradis se trouvait ailleurs que sur Terre. Fondée principalement sur l’idée que les lois du marché avaient un caractère naturel, il s’agissait de rejeter toute culture sociale de riposte collective et organisée devant les inégalités, la discrimination et l’injustice d’un système économique bien structuré, conçu au profit d’une minorité dominante : le système capitaliste.

Aujourd’hui, l’éclatement de la crise financière et son évolution rapide en crise économique mondiale viennent ébranler cette notion d’immuabilité des lois du marché. À nouveau sont remis en cause les structures et le système économique qui engendrent de telles crises et de telles inégalités.

Qu’à cela ne tienne, de nouvelles théories de culpabilisation se substituent aux anciennes, confortant l’idéologie du capitalisme tout en prétendant la dénoncer. N’a-t-on pas entendu récemment un certain Nicolas Sarkozy dénoncer le capitalisme financier pour aussitôt faire appel à la refonte du capitalisme familial. Donnant l’impression que différents modes du système capitaliste existent en parallèle, le trompe-l’oeil de Sarkozy cache le fait que le capitalisme familial constitue en réalité une étape révolue du capitalisme et non pas un choix de modèle.

La crise financière permet de cibler facilement certains de ses éléments déclencheurs et même d’identifier leurs auteurs. À la limite toutefois, il s’agit d’une manière de personnaliser les coupables plutôt que d’identifier les causes structurelles ayant mené à la crise.

Cette vision de droite trouve écho, hélas, au sein de la gauche et alimente un discours moral qui se répand facilement dans des théories plus ou moins utopiques à l’effet que la surconsommation (dont la crise des subprimes en est l’élément le plus visible) est à l’origine de la crise actuelle. Ce discours sur la surconsommation est d’autant plus attrayant qu’il s’appuie sur l’évidence que celle-ci est aussi inévitable qu’elle est incompatible avec la notion d’un développement durable et écologique, dans une perspective capitaliste.

Au milieu des années ’80, la guerre idéologique contre les pays socialistes prenait à partie la structure de propriété collective de ceux-ci. On reprochait notamment à l’économie planifiée de ne pouvoir concurrencer les pays occidentaux sur le plan de la consommation. À développement scientifique égal, on stigmatisait l’économie socialiste pour son incapacité à convertir instantanément la moindre découverte dans le domaine de la consommation, en production de masse, à l’instar des pays occidentaux. Aujourd’hui, le libre marché démontre que cette victoire du capitalisme sur le socialisme n’était en réalité qu’une victoire à la Phyrrus.

Et la question reste entière. Doit-on s’attaquer d’abord à la surconsommation ou au capitalisme ? À l’anarchie du marché et à la non-intervention de l’État ou non ? Poser la question c’est comme demander s’il vaut mieux guérir que prévenir.

La simplicité volontaire

C’est dans cette mouvance d’utopie et d’ambiguïté que se situe d’après moi, la notion de simplicité volontaire.

D’après Serge Mongeau, un des premiers protagonistes de la simplicité volontaire au Québec, « La simplicité volontaire c’est de s’écarter du courant de la consommation dans lequel on se laisse entraîner à croire que c’est en consommant, en achetant, en acquérant des biens qu’on peut être beaucoup plus heureux et répondre à ses besoins. Or, la plupart de nos consommations ne répondent pas à nos vrais besoins, ceux qui nous permettraient vraiment de nous épanouir. »

Pascal Grenier et Louis Chauvin, respectivement Président du Groupe de simplicité volontaire au Québec et Président du Réseau québécois pour la simplicité volontaire, vont encore plus loin. Dans le journal Le Devoir du 8 janvier 2009, parlant de la crise financière, ces derniers affirment : « … les faits récents nous révèlent que c’est en grande partie la surconsommation, voire l’hyperconsommation, associé à l’endettement excessif, qui a créé cette situation mondiale » et encore « … l’occasion est favorable pour effectuer des changements sociaux et économiques profonds, plutôt que cosmétiques ».

Oui ! La surconsommation et l’endettement excessif sont des facteurs aggravants de la crise. Non ! La simplicité volontaire ne constitue pas et ne peut pas constituer un changement économique profond. Car autant il est question ici de facteurs aggravants, autant on peut dire aussi qu’ils constituent une expression de la crise et non pas la cause de celle-ci.

Tout au plus, cette approche, basée essentiellement sur l’idée que la consommation relève du libre-choix de l’individu, est un exemple parfait d’une approche morale face à la crise alors qu’une solution en profondeur requiert au contraire, des changements de type structurels et systémiques. Le système financier non contrôlé, la concentration dans les mains d’une minorité de sommes faramineuses, difficilement imaginables tellement elles sont considérables, l’étouffement des classes populaires sous l’endettement., qui est rarement un libre-choix, et davantage encore l’étouffement des pays en développement qui sont amenés par une réglementation mondiale orchestrée au sein du FMI et de l’OMC à financer leur propre dette alors qu’on leur impose l’importation de produits qu’ils pourraient eux-mêmes produire… résultent dans un manque à gagner et de ce fait interfèrent directement dans la libre circulation des biens et marchandises. D’où la nécessité éventuelle de mesures keynésiennes pour relancer l’économie, mais aussi de mesures contraignantes pour empêcher la libre manipulation du marché.

Pourrait-on croire que les tenants de la simplicité volontaire fassent des exceptions et nuancent leur approche ? Au contraire, ils étendent leur théorie jusqu’à l’idée de dénoncer le principe même du développement économique en lui substituant le concept de la décroissance conviviale.

La décroissance conviviale

Ainsi dans certains milieux, oppose-t-on désormais la notion de décroissance conviviale (en Europe on préfère l’expression décroissance soutenable) à toute notion de développement et de croissance économique, voire même à l’idée d’un développement durable. Fondé sur l’idée que toute notion de croissance est articulée derrière la croyance que les ressources de la terre sont inépuisables, le principe de la décroissance conviviale soutient dans les faits le statu quo dans les rapports économiques inégaux entre pays riches et pays pauvres.

En pratique, aucun programme voulant mettre un terme à la surconsommation (et ici, il est vraiment question de surconsommation planétaire et de menaces à l’écologie), ni aucun programme de partage équitable des richesses, ne sera réalisable s’il ne s’attaque pas directement aux structures économiques responsables de l’anarchie du marché et de ces mêmes inégalités. D’ailleurs, il est curieux qu’on oppose décroissance conviviale à développement durable alors que ce dernier concept est justement fondé sur l’idée que le développement présent ne doit pas sacrifier les besoins des générations futures. Contestée sur le plan scientifique, l’idée de la décroissance conviviale ne répond pas à nombre de questions concernant la croissance continue de la population mondiale ni au concept même de l’évolution sociale.

Au moment où la crise nous force à penser les choses autrement, une certaine vigilance s’impose pour éviter que la gauche transmette elle-même des idées utopiques qui confortent le statu quo et la position économiques, des classes et des pays dominants.


Deux sites incontournables pour bien comprendre la nature de la crise financière et économique actuelle:

http://www.economieautrement.uqam.ca/
http://mobilisation.ca/

Deux sites où la théorie de la décroissance conviviale est contestée :

http://iceblog.over-blog.com/article-25538381-6.html
http://www.espace-citoyen.be/site/index.php?EsId=1&Module=mod-produit&Indice=1-12-62/

Opinion Scène québécoise

La raison pour ne pas célébrer la Bataille des Plaines

Certes il y a plusieurs raisons pour ne pas célébrer. Certains vous diront qu’on ne célèbre pas une défaite. Et c’est vrai. D’autres diront que le Fédéral n’a pratiquement rien fait pour le 400e de Champlain. Et c’est vrai aussi. Pour la CCBN (Commission des champs de bataille nationaux) et son président André Juneau, la décision de ne pas reconstituer la Bataille des Plaines d’Abraham, relève avant tout d’une question de sécurité. Au Canada anglais on est en furie contre le Québec et son refus de collaborer tandis que pour les Québécois, tout cela est du Québec bashing à nouveau.

Peut-on déjà tirer une conclusion de tout ce brouhaha ? Oui, une conclusion incontestable et qui suffit à elle seule comme raison de ne pas célébrer le 250e anniversaire de la Bataille des plaines d’Abraham, ni d’un côté, ni de l’autre : la question nationale n’est toujours pas réglée au Canada. Elle ne le sera pas tant que le Québec ne se verra pas accordé ou tant qu’il ne s’emparera pas lui-même, de son droit à l’autodétermination nationale, à la souveraineté.

Un devoir de mémoire

C’est un fait que l’événement ne doit pas passer inaperçu. L’anniversaire de la Bataille des Plaines est une bonne occasion de réfléchir au sens à donner à l’évolution de l’histoire depuis 250 ans. Ne l’oublions pas, la victoire des Plaines, c’était en réalité la Conquête. Mais cette victoire n’était pas que militaire et elle n’aurait pu se réaliser en fait, à travers les ans, sans la participation d’une fraction importante de dirigeants francophones du Québec, notamment le clergé, qui acceptèrent de jouer les collaborateurs avec le conquérant en lui garantissant la paix sociale et la soumission de tout un peuple. En échange de quoi ? Une assemblée nationale (lire provinciale) avec certains pouvoirs législatifs et économiques ainsi qu’un contrôle sur certains domaines d’ordre politique, dont l’éducation.

Le prix à payer allait être lourd. Dans la vision des provincialistes et des fédéralistes du Canada anglais, la conquête devait non seulement mettre un terme au rêve de construire un Canada (français) caressé par les premiers colons d’origine française, mais devait aussi faire disparaître toute velléité de construire une nation francophone au Canada.

Dans un tel contexte, autant la célébration de la Bataille des plaines d’Abraham ne peut exprimer qu’une forme d’aliénation chez les Québécois, autant elle ne peut exprimer qu’une forme de chauvinisme, voire de néo-colonialisme chez les Canadiens anglais. Quand Jean Charest dénonce les dérapages qu’il attribue aux menaces de violence contre toute éventuelle célébration de la Bataille des Plaines, il manque une belle occasion d’identifier le véritable dérapage de la CCBN qui voulait profiter de l’événement pour sceller dans l’imaginaire des Canadiens et des Québécois, l’issue d’une bataille qui, en réalité n’est toujours pas terminée : la lutte nationale des Québécois.

Une cause toujours bien vivante

À partir de quand peut-on décréter qu’une cause est terminée ? Il y en a pour dire que la cause palestinienne est perdue. Que les réalités au Moyen-Orient ne sont plus ce qu’elles étaient avant la Seconde Guerre mondiale. Il y en a pour dire que les peuples autochtones en Amérique mènent aussi des batailles perdues d’avance. Qu’il est temps de reconnaître que nous ne vivons plus à l’ère des coureurs des bois. Combien de temps durera le désir des Serbes de reconquérir le Kosovo dont ils ont été chassés par l’intervention militaire de l’OTAN ?

Combien de causes pourrait-on identifier ainsi à travers le monde, qui entretiennent toujours le germe de la résistance et d’un potentiel de rébellion ? La réponse à la question de savoir si l’on peut décréter qu’une cause est terminée sera toujours biaisée selon qu’on est dans le camp des vainqueurs ou dans celui des vaincus. Et encore une fois, pourrons-nous dire que l’ Histoire sera toujours celle des vainqueurs.

Ainsi présentée toutefois, aucune grande cause à travers le monde ne trouvera un jour de solution. L’angle strictement historique et national ne peut que raviver les sentiments nationaux d’un côté et chauvins de l’autre. L’Histoire n’est pas un échange bipartite perpétuel du pouvoir entre vaincues et vainqueurs. C’est pourquoi l’amertume de la défaite et les cicatrices de l’histoire ne se referment jamais pour les vaincus.

La question nationale ne peut se résorber que de deux façons, soit  : l’assimilation totale, ce qu’on peut aussi appeler un génocide culturel, soit : la reconnaissance et la satisfaction des droits nationaux. Tant que la nation existe, tant qu’elle se bat pour ses droits, la cause en sera justifiée. Autant celle des Palestiniens, que celle des peuples autochtones, que celle des Québécois. Même si dans leurs expressions, biens souvent, ces luttes n’ont rien de comparable.

Quels intérêts nationaux

La question nationale ne s’exprime pas toujours de manière aussi tragique qu’en Palestine, ni de manière aussi directe que dans le rapport entre une métropole et une colonie. Par contre, tous les mouvements nationaux qui sont allés jusqu’au bout de leurs revendications ont mené soit à l’autonomie nationale, soit à l’indépendance nationale et à la création d’États sur le principe de : une Nation, un État. Un processus historique qui accompagnait dans tous les cas, le désir de la bourgeoisie naissante de prendre le pouvoir et le contrôle sur son marché national.

Ce qui est paradoxal ici, c’est qu’à l’heure de la mondialisation et du néolibéralisme, même les bourgeoisies nationales s’entendent pour favoriser les ententes de libres-échanges, jusqu’à appuyer la suprématie des tribunaux commerciaux et des grandes corporations industrielles, économiques et financières sur les pouvoirs législatifs nationaux. Jacques Parizeau et Bernard Landry furent tous les deux de fervents défenseurs de l’Accord de libre-échange négocié par le gouvernement conservateur de Brian Mullroney, avec les États-Unis.

Cela révèle qu’on ne peut pas dissocier la question nationale des questions économiques et sociales, plus précisément des intérêts des classes sociales pour qui l’on veut la souveraineté. Si on peut dire que la question nationale au Canada existera tant que le Québec sera amputé de l’exercice de son droit à l’autodétermination, il est faux d’affirmer par ailleurs que l’indépendance en soi, règlera la question nationale pour les Québécois. Surtout si cette indépendance est mise au service du néocolonialisme moderne par le biais de la mondialisation.

Si devoir de mémoire il y a, il faudra alors se rappeler que la nation n’est ni homogène, ni abstraite. À l’heure où une crise financière et économique d’une envergure sans précédent affecte la plupart des grandes puissances économiques, les forces démocratiques ne doivent pas se laisser duper par les prétendus défenseurs de la nation qui associent les intérêts des grandes entreprises et des sociétés financières aux intérêts de la nation. Une politique de sortie de crise pour qu’elle soit véritablement dans les intérêts de la nation, doit avant tout être conçue dans les intérêts des travailleurs et de la population en général. Ce qui impliquera nécessairement la solidarité entre les victimes de ces mêmes puissances financières et économiques, indépendamment des frontières nationales.

Opinion Scène québécoise

Irez-vous voir le film de Denis Villeneuve ?

Irez-vous voir le film de Denis Villeneuve sur le tragique événement de Polytechnique en décembre ’89, est désormais la question de l’heure au Québec. Personnellement je crois bien que j’irai voir le film malgré le fait que j’ignore son impact réel sur la société, sur sa possibilité de changer ce que les événements eux-mêmes n’ont pas réussi à changer. Le film aura sans doute le mérite de nous rappeler, au moins, que les pensées morbides et maladives qui habitaient Marc Lépine, prenaient leurs sources dans une réalité sociale toujours présente aujourd’hui, malgré les progrès accomplis.

Misogyne et déséquilibré sont les expressions les plus courantes pour caractériser la nature du geste de Marc Lépine. Une manière croiront certains de faire valoir qu’il s’agit d’un cas isolé. Néanmoins, en s’attaquant uniquement à des femmes et en les identifiant comme responsables de ses propres malheurs, Lépine véhiculait une rengaine systémique entretenue par des politiques et des pratiques discriminatoires envers les femmes. Des pratiques qui acceptent mal l’entrée des femmes sur le marché du travail et qui justifient par de soi-disant contraintes économiques, l’iniquité salariale envers les femmes. Ne devrait-on pas en fait, parler de misogynie sociale ?

Irez-vous voir le film Polytechnique ? Je l’ignore bien sûr. Mais pourrions-nous faire quelque chose tous ensemble pour que Stephen Harper, dont le discours du trône de novembre 2009 trouve encore le moyen de ne pas respecter la politique d’équité salariale, aille voir le film de Denis Villeneuve ? Pourrions-nous faire quelque chose pour que le journaliste Sylvain Bouchard de 93,3 FM (et ses patrons), qui s’insurge publiquement, en s’adressant directement à des ados, du fait qu’un manuel scolaire souligne le bon travail de Françoise David, pour la défense du droit des femmes, aille voir le film lui aussi ?

L’éducation justement, en général, est à la base des valeurs qu’on enseigne aux enfants. Hélas, l’éducation sera toujours le reflet des intérêts que la société dessert en premier lieu. Est-ce à dire qu’il n’y a rien à faire ? Non, bien au contraire. Une chance qu’il y a encore des personnes comme Françoise David qui le comprennent.

Opinion Scène canadienne

D’une coalition à l’autre

La question n’était plus de savoir si Ignatieff appuierait le budget et par le fait même, le gouvernement Harper, mais bien comment il s’y prendrait pour le faire sans trop perdre la face. Aidé par l’appui au budget des provinces de l’Ouest et de l’Ontario qui n’ont que faire des récriminations du Québec selon lequel ce budget lui fera perdre près d’un milliard de dollars d’ici deux ans, Ignatieff y trouve une belle occasion de refaire l’image des Libéraux à l’Ouest. D’abord en gardant le silence sur les demandes de Québec. Ensuite, en endossant le budget pour se montrer ‘responsable’ et tenter de prendre le crédit des investissements dans l’économie.

Cette porte de sortie, tous les médias bien ancrés sur les positions de la droite ne cessent de la lui suggérer depuis hier, en commençant par Radio-Canada et son journaliste Michel Auger. Celui-ci affirmait que le seul choix véritable d’Ignatieff se situait entre l’appui au budget, avec quelques amendements de cosmétiques, et la décision de replonger le pays dans une crise politique qui empêcherait la mise en oeuvre rapide de mesures venant soi-disant en aide aux victimes de la crise.

Rendons claire une question au départ. Ce budget n’a rien d’un budget de sortie de crise. Donnant à gauche et à droite sans plan réel de développement, le gouvernement Harper qui, il y a quelques semaines encore affirmait que le prochain budget ne serait pas déficitaire, nous annonce maintenant un déficit de près de 34 milliards de dollars. Par son appui, Ignatieff dévoile le jeu qu’il a gauchement tenté de cacher depuis sa nomination à la tête du Parti libéral : sa décision de maintenir les Conservateurs au pouvoir plutôt que de participer à une coalition Libéral-NPD. En votant pour un budget électoraliste, toujours aussi revanchard envers le Québec et qui poursuit des visées néolibérales dans le domaine de l’environnement, Ignatieff vient d’assurer les grandes entreprises industrielles et financières, qu’il sera, à la tête du Parti libéral, un fidèle serviteur de leurs intérêts et un instrument de rechange valable, lorsque celles-ci le jugeront utile.

N’oublions pas par ailleurs que dans son discours du trône d’il y a deux jours, le gouvernement conservateur souligna le fait qu’à l’égard de toutes les autres questions, non budgétaires, il fallait s’en remettre au discours du trône de novembre 2008. Ce même discours qui fut le déclencheur d’une crise politique momentanée et de l’idée même d’une coalition Libéral-NPD. Il ne s’agissait pas que d’économie. Il s’agissait aussi de la non-confiance envers les Conservateurs qui venaient de rendre public leur ‘agenda’ caché hostile à l’équité salariale et au droit de grève dans la fonction publique ; menaçant de mettre un terme au financement des partis politiques. Des mesures que le gouvernement Harper attend désormais l’occasion de mettre en application.

En se peinturant dans un coin, les Libéraux pourraient avoir une belle surprise. La coalition Libéral-NPD étant morte pour TRÈS longtemps, la seule alternative des Libéraux face aux Conservateurs sera désormais des élections générales.

La question pour le Parti libéral : Sera-t-il prêt, le moment venu ?
La question pour les Canadiens : Voter Libéral changera-t-il vraiment quelque chose ?

Opinion Scène internationale

Le plus grand défi de Barack Obama

Fallait-il mettre ce mot dans la rubrique Édito ou dans la rubrique Repères ? Voilà un bien maigre dilemme au moment où Barak Obama est investi des pleins pouvoirs à la présidence des États-Unis. Pour le moment, je navigue entre mon blogue et la télé espérant que l’ouverture sur le monde qu’annonce le nouveau président des États-Unis, par opposition à la politique de confrontation de son prédécesseur, Georges W. Bush, convertira l’ immense espoir de paix suscité par son élection, en réalité.

Si seulement la politique américaine était celle d’un seul homme, d’un seul président. Hélas! Obama est à la tête du Parti démocrate et l’histoire démontre que dans la solution des grands enjeux internationaux et nationaux, la liberté et la démocratie n’ont jamais été l’oeuvre d’une grande personnalité. En la matière, les Démocrates et les Républicains se sont perpétuellement échangé les bonnes manières. Paradoxalement, ce sont les démocrates, avec une autre grande personnalité porteuse d’espoir, John F. Kennedy, qui ont attaqué militairement Cuba, sans avertissement, avec entre autres la mission d’assassiner Fidel Castro. C’est encore le successeur de Kennedy, Lyndon B. Johnson un autre Démocrate, qui a déclenché les premières attaques militaires contre le Vietnam, tandis qu’il a fallu attendre la venue au pouvoir d’un Républicain, Richard Nixon, pour signer les Accords de Paris qui allaient en 1973 mettre fin à la guerre du Vietnam.

L’histoire moderne des États-Unis est marquée par une lutte féroce entre le complexe militaro-industriel et le monde financier, dont les intérêts ont fini par fusionner au cours des dernières décennies, au point de faire disparaître pratiquement toutes les différences apparentes entre Démocrates et Républicains. Dans la forme et le discours toutefois, les Démocrates ont toujours tenu un propos plus proche des préoccupations populaires. Avec l’isolement politique et la haine suscitée à leur égard dans le monde ; avec des centaines de milliards de dollars détournés vers l’industrie militaire et l’une des plus graves crises financières de leur histoire, une crise qui s’accompagne de millions de mises à pied et de centaines de milliards de dollars détournés cette fois vers les grandes institutions financières et en l’absence d’une alternative politique de masse, le discours de Barack Obama ne peut pas ne pas laisser une empreinte profonde auprès de la population américaine ainsi qu’ un grand espoir de renouveau et de dialogue à travers le monde.

Les principaux défis d’Obama

La liste est longue des principaux défis qu’attendent Obama. Il a lui-même mis la barre assez haute en s’engageant à fermer rapidement la prison de Guantanamo et d’ordonner le retrait des troupes américaines d’Irak. Dans son  discours il a maintenu sa décision de faire reposer le développement économique des États-Unis sur les acquis de la science et de la technologie, notamment dans le domaine environnemental. Il devra toutefois composer avec la contradiction de sa politique en Irak et celle de poursuivre la guerre en Afghanistan ; entre sa déclaration d’une politique de dialogue et de paix, notamment avec les dirigeants iraniens et son appui aux Israéliens dans la guerre de ces derniers contre les Palestiniens.

Donnons la chance au coureur serait sans doute la formule la plus appropriée ici. Mais retenons que d’autres enjeux majeurs attendent le nouveau président des États-Unis. Pour être conséquent avec ses propos sur un monde de paix, de dialogue et libéré des tensions militaires, les États-Unis devront mettre fin à leur projet d’installation des missiles soi-disant antimissiles, pouvant atteindre la Russie à partir de la Pologne. Plus près de chez eux, ils devraient non seulement fermer la prison de Guantanamo, mais mettre fin à leur embargo économique contre Cuba. Ils devraient en fait se retirer complètement de Guantanamo et retourner ce territoire à son propriétaire cubain tout comme ils devraient cesser  leurs efforts de déstabilisation en Amérique latine.

Les mois qui viennent nous diront vraiment ce que peut faire une forte personnalité démocrate à l’intérieur d’un gouvernement et d’un parti dont la tradition repose généralement sur la défense des intérêts des puissances économiques qui dirigent vraiment ce pays. Chose certaine, la grandeur de l’espoir que fait naître Barack Obama aujourd’hui, illustre au plus haut point le désaveu des politiques américaines tant aux États-Unis que dans le monde. Il illustre aussi l’énorme appui dont jouit le nouveau président des États-Unis.

Le plus grand défi d’Obama sera de cultiver cet appui par sa détermination à réorienter la politique américaine et sa capacité de mobiliser la population et les forces démocratiques à chaque fois que le pouvoir du complexe militaro, industriel et financier, toujours bien représenté tant chez les Démocrates que chez les Républicains, voudra maintenir l’orientation néolibérale du précédent gouvernement US.

Opinion Scène québécoise

Victoire de la droite nationaliste et néolibérale

L’élection du gouvernement libéral minoritaire de Jean Charest hier le 26 mars 2007 avec l’Action démocratique du Québec de Mario Dumont en tant qu’opposition officielle et le Parti québécois d’André Boisclair et ses 36 candidats élus, ramène le Québec loin en arrière tout en mettant à l’avant-scène la vieille droite nationaliste de souche.

Populisme et démagogie au rendez-vous

Même si Mario Dumont s’est offusqué de s’être fait comparer à Jean-Marie Le Pen, comme ce dernier, il a lancé sa campagne électorale en misant sur les vieux réflexes frileux d’une grande partie de la population face à la nouvelle immigration en dénonçant et en exagérant grandement la portée des accommodements raisonnables et en misant sur la réduction au maximum du rôle de l’État dans les affaires économiques et sociales. Mario Dumont se dit sensible à des solutions qu’il prétend nouvelles mais qui se résument toujours à plus de pouvoir pour la libre entreprise dans le domaine de la santé, de la famille et de l’éducation. L’ADQ va jusqu’à réclamer l’abolition des Commissions scolaires. Ce faisaint l’ADQ a canalisé le vote d’une grande partie de la vieille droite nationaliste et néo-libérale ainsi que d’une fraction de la jeunesse, que le virage vers la mondialisation des années ’80 et ’90 aura fait pencher vers l’apolitisme et le cynisme. Un électorat conquis par le populisme et la démagogie de l’ADQ.

La consécration d’un échec historique

Près de quarante ans après l’éclosion du mouvement national et la mise sur pied du Parti québécois en tant que principal porte-drapeau de la souveraineté, l’élection du 26 mars 2007 constitue à ce jour la plus grande expression de l’échec de la petite bourgeoisie québécoise francophone dans sa prétention à défendre les intérêts de la nation québécoise.

Le Parti québécois pourra-t-il se relever d’un échec aussi désastreux ? À la toute fin de la campagne électorale, André Boisclair sentant la droite lui échapper au profit de l’ADQ lançait un ultime et lamentable appel à la gauche et aux forces démocratiques du Québec. Lui qui avait commencé sa campagne électorale en s’attaquant de front au mouvement syndical et en promettant de mettre ce dernier au pas dans un éventuel gouvernement péquiste. À en juger par le résultat des élections, la décision de la CSN notamment de ne plus appuyer officiellement le Parti québécois et la montée soudaine des tiers partis dont Québec solidaire qui a obtenu des résultats impressionnants dans Gouin et dans Mercier, on peut croire que l’avenir du Parti québécois sera plus qu’incertain dans les prochaines années

Près de trente ans de pouvoir n’auront pas été suffisants au Parti québécois pour entreprendre un véritable processus de réformes démocratiques et progressistes y compris une véritable réforme électorale, celle qu’il réclamait à hauts cris lorsqu’il faisait son entrée sur la scène politique en 1970 et en 1973. Après son soi-disant préjugé favorable envers les travailleurs qu’il a tôt fait d’abandonner au profit des compressions dans la fonction publique et de lois antisyndicales que la Cour suprême du Canada (il faut le faire) allait juger antidémocratiques, le Parti québécois n’a cessé de dévoiler au cours des ans son véritable ascendant néo-libéral pour lequel il réclamait les pleins pouvoirs de législation et de taxation.

Une assemblée constituante pour définir l’avenir du Québec

N’eut été d’un mode de scrutin antidémocratique, de l’absence des Verts et surtout de Québec solidaire au débat des chefs, n’eut été d’une couverture médiatique discriminatoire envers les tiers partis, une grande partie du raz-le-bol des Québécois se serait tourné vers une alternative de gauche plutôt que vers le cul-de-sac adéquiste. Quoi qu’il en soit, qu’il favorise le « fédéralisme rentable » de Jean Charest ou l' »autonomisme » improvisé de fin de campagne de Mario Dumont, l’échec brutal du Parti Québecois pour la deuxième élection consécutive et son retour à la case départ illustrent encore l’échec de l’indépendantisme pour l’indépendantisme. À ce sujet, la politique nationale mise de l’avant par Québec solidaire ouvre une voie intéressante, dans la mesure ou Québec solidaire ne tombe pas dans le même piège que le Parti québécois en subordonnant à l’objectif de la souveraineté ses orientations politiques et sociales plutôt que l’inverse. En prônant la mise sur pied d’une Assemblée constituante, Québec solidaire ouvre la porte à une solution originale de la question nationale dont la nature pourrait être déterminée par un vaste débat démocratique permettant d’élaborer le type de rapports politiques et constitutionnels que le Québec voudrait avoir avec le reste du Canada en priorisant les intérêts économiques des travailleurs et de l’ensemble des citoyens, en somme, en élaborant sa politique nationale en fonction d’un projet de société progressiste qui ne répondrait plus au dictat de l’Establishment économique et de la droite néolibérale.

Opinion Scène québécoise

Pourquoi je vote Québec solidaire le 26 mars

Depuis la fin des années ’80 toute la scène politique gouvernementale, tant canadienne que québécoise, sans parler des médias, des institutions et des interprètes de la vie économique et politique, fut dominée par le courant néolibéral. Un courant construit sur la thèse démagogique qu’il fallait mettre un terme à l’État providence. Après plus de vingt longues années pour faire ses preuves, ce courant de droite continue toujours de rabâcher le même slogan, laissant libre cours aux extravagances économiques des grandes puissances financières, sabrant dans les programmes gouvernementaux, grugeant dans les conditions de vie des travailleurs et réduisant à un minimum la capacité d’intervention de l’État dans les affaires sociales et économiques. Et pourtant, après ces vingt longues années, la richesse a continué de s’accroître au profit des grandes entreprises tandis que la condition de vie des travailleurs a continué de se détériorer, le dernier exemple en date étant celui des travailleurs d’Olymel à qui on vient de faire subir une baisse de salaire de près de 30%.

Je vote Québec solidaire pour ses engagements concrets face aux conditions économiques et sociales des travailleurs, à l’environnement et à ses politiques culturelles, mais surtout pour le fait qu’il représente pour la première fois depuis la fin des années ’80 le réveil politique des travailleurs et des citoyens ordinaires, qui ont été les grandes victimes du courant néo-libéral. Un courant contre lequel Québec solidaire est véritablement la seule opposition dans la présente campagne électorale.

Opinion Scène québécoise

Accommodements raisonnables, le vrai danger !

Un récent sondage SOM-La Presse-Le Soleil démontre que près de six Québécois sur 10 (58,6 %) estiment que la société est trop tolérante en matière d’accommodements raisonnables. En même temps, le sondage fait ressortir que 61,8% des Québécois considèrent l’immigration comme un atout pour la société.

L’ouverture au phénomène de l’immigration et l’opposition aux accommodements raisonnables cela ressemble à une contradiction qui révèle les vrais sentiments des Québécois au sein d’une société ouverte pour qui le concept des accommodements raisonnables demeure une notion mal définie ou tout au moins mal comprise.

Interrogé récemment à Radio-Canada, Julius Grey rappelait, fort à propos, que la notion d’accommodement raisonnable s’appliquait aux individus et non pas aux groupes ou à des communautés, contrairement à l’idée que les médias et les courants de droite véhiculent généralement. Même si parfois la nuance est ténue elle demeure importante, car faut-il le rappeler, de tels accommodements ne sont admissibles que lorsqu’ils sont raisonnables. Il ne s’agit donc pas d’exclure ou de placer au-dessus des lois des communautés entières selon leur croyance ou leur culture propre, mais bien de faciliter l’intégration dans un milieu d’individus dont la culture tend parfois à les isoler pourvu que cela ne perturbe pas fondamentalement le fonctionnement de la société.

Ce qui apparaît par ailleurs inquiétant de ce sondage est le constat que plus les Québécois sont éduqués, plus ils s’opposent aux accommodements raisonnables. L’explication des sondeurs dans ce cas veut que plus les Québécois sont scolarisés, plus ils favorisent une société laïque. On pourrait se demander toutefois si nous n’assistons pas tout simplement à un tournant à droite des sphères de la société traditionnellement plus au centre, sinon plus à gauche et si le virage à droite n’est pas en train de gagner les couches les plus éduquées de la population.

Tout comme on évitera d’établir une équation entre pensée de gauche et nationalisme, on ne s’étonnera pas du fait que l’intolérance augmente en proportion lorsque les personnes consultées sont de langue maternelle française. 65,9% de ces dernières considèrent le Québec trop tolérant contre 27% des personnes avec une autre langue maternelle. Un phénomène qui n’est pas sans rappeler la vraie nature du nationalisme encore présent au sein de l’ADQ de Mario Dumont qui semble vouloir placer cette question au niveau d’un enjeu électoral comme le font aujourd’hui en France, non sans un certain succès hélas, les Jean-Marie Le Pen et les Nicolas Sarkozy.

Commentaires (anciens)

1. Le jeudi 25 janvier 2007 à 12:40, par Danisou

Allô Claude,

Il faut lire la position du MLQ (Mouvement Laïque Québécois), porte-parole de la laïcité au Québec.

« Contribution du MLQ au débat sur les accommodements raisonnables »
Position adoptée par le Conseil national du MLQ, fin 2006

http://www.mlq.qc.ca/6_dossiers/accommodement/accommodement_position.html

2. Le jeudi 25 janvier 2007 à 20:18, par Claude Demers

Bonjour Danisou,

C’est un très bon texte en effet, qui en plus, met en relief la distinction entre le sens initial de l’expression « accommodement raisonnable » et le sens plus « actuel » d’accommodements fondés sur la croyance religieuse. La distinction faite entre accommodement raisonnable et liberté d’expression est aussi importante et je partage l’opinion à l’effet que la liberté d’expression doive aussi être encadrée et subordonnée, si je peux me permettre, aux intérêts supérieurs (collectifs et démocratiques) de la société.

Cela dit je crois que la négation en bloc des accommodements raisonnables dans le sens culturel et religieux représente aussi une erreur et un glissement dangereux. Faudra-t-il déterminer alors que le port d’une chaine avec une croix « bien chrétienne » au cou constitue un symbole religieux à interdire dans nos institutions scolaires ? Si on peut mettre en cause des situations exigeant des frais supplémentaires dans les budgets déjà limités alloués aux institutions, ou encore des situations ou les enseignants et les programmes sont modifiés à l’encontre du principe, que j’endosse entièrement par ailleurs de la laïcité, il en va autrement lorsqu’il s’agit de la possibilité pour un individu d’afficher ses propres croyances, que ce soit par la manière de se coiffer ou des objets qu’il porte sur lui lorsque ces derniers ne représentent aucune menace et danger pour les autres. En d’autres mots, les institutions publiques ont le devoir de promouvoir la laïcité, mais pas d’interdire à une personne d’afficher ses croyances du fait qu’elle se trouve sur un lieu public et laïc.

Je crois qu’ici c’est le MLQ qui confond « liberté d’expression » avec « accommodement raisonnable » et que celui-ci peut être nécessaire pour permettre l’exercice de celui-là.

Le danger que je décèle dans l’attitude négative face aux accommodements raisonnables est lié au traitement de cette question sur une base strictement théorique qui ne tient pas compte d’une situation aussi réelle que nouvelle, soit l’immigration moderne et de la nécessité de favoriser l’intégration d’individus aux valeurs différentes de notre société de manière inclusive et non coercitive.

J’endosse entièrement par ailleurs la position du MLQ sur la nécessité d’officialiser et d’universaliser la laïcité de l’enseignement et des institutions publiques.