L’élection du gouvernement libéral minoritaire de Jean Charest hier le 26 mars 2007 avec l’Action démocratique du Québec de Mario Dumont en tant qu’opposition officielle et le Parti québécois d’André Boisclair et ses 36 candidats élus, ramène le Québec loin en arrière tout en mettant à l’avant-scène la vieille droite nationaliste de souche.
Populisme et démagogie au rendez-vous
Même si Mario Dumont s’est offusqué de s’être fait comparer à Jean-Marie Le Pen, comme ce dernier, il a lancé sa campagne électorale en misant sur les vieux réflexes frileux d’une grande partie de la population face à la nouvelle immigration en dénonçant et en exagérant grandement la portée des accommodements raisonnables et en misant sur la réduction au maximum du rôle de l’État dans les affaires économiques et sociales. Mario Dumont se dit sensible à des solutions qu’il prétend nouvelles mais qui se résument toujours à plus de pouvoir pour la libre entreprise dans le domaine de la santé, de la famille et de l’éducation. L’ADQ va jusqu’à réclamer l’abolition des Commissions scolaires. Ce faisaint l’ADQ a canalisé le vote d’une grande partie de la vieille droite nationaliste et néo-libérale ainsi que d’une fraction de la jeunesse, que le virage vers la mondialisation des années ’80 et ’90 aura fait pencher vers l’apolitisme et le cynisme. Un électorat conquis par le populisme et la démagogie de l’ADQ.
La consécration d’un échec historique
Près de quarante ans après l’éclosion du mouvement national et la mise sur pied du Parti québécois en tant que principal porte-drapeau de la souveraineté, l’élection du 26 mars 2007 constitue à ce jour la plus grande expression de l’échec de la petite bourgeoisie québécoise francophone dans sa prétention à défendre les intérêts de la nation québécoise.
Le Parti québécois pourra-t-il se relever d’un échec aussi désastreux ? À la toute fin de la campagne électorale, André Boisclair sentant la droite lui échapper au profit de l’ADQ lançait un ultime et lamentable appel à la gauche et aux forces démocratiques du Québec. Lui qui avait commencé sa campagne électorale en s’attaquant de front au mouvement syndical et en promettant de mettre ce dernier au pas dans un éventuel gouvernement péquiste. À en juger par le résultat des élections, la décision de la CSN notamment de ne plus appuyer officiellement le Parti québécois et la montée soudaine des tiers partis dont Québec solidaire qui a obtenu des résultats impressionnants dans Gouin et dans Mercier, on peut croire que l’avenir du Parti québécois sera plus qu’incertain dans les prochaines années
Près de trente ans de pouvoir n’auront pas été suffisants au Parti québécois pour entreprendre un véritable processus de réformes démocratiques et progressistes y compris une véritable réforme électorale, celle qu’il réclamait à hauts cris lorsqu’il faisait son entrée sur la scène politique en 1970 et en 1973. Après son soi-disant préjugé favorable envers les travailleurs qu’il a tôt fait d’abandonner au profit des compressions dans la fonction publique et de lois antisyndicales que la Cour suprême du Canada (il faut le faire) allait juger antidémocratiques, le Parti québécois n’a cessé de dévoiler au cours des ans son véritable ascendant néo-libéral pour lequel il réclamait les pleins pouvoirs de législation et de taxation.
Une assemblée constituante pour définir l’avenir du Québec
N’eut été d’un mode de scrutin antidémocratique, de l’absence des Verts et surtout de Québec solidaire au débat des chefs, n’eut été d’une couverture médiatique discriminatoire envers les tiers partis, une grande partie du raz-le-bol des Québécois se serait tourné vers une alternative de gauche plutôt que vers le cul-de-sac adéquiste. Quoi qu’il en soit, qu’il favorise le « fédéralisme rentable » de Jean Charest ou l' »autonomisme » improvisé de fin de campagne de Mario Dumont, l’échec brutal du Parti Québecois pour la deuxième élection consécutive et son retour à la case départ illustrent encore l’échec de l’indépendantisme pour l’indépendantisme. À ce sujet, la politique nationale mise de l’avant par Québec solidaire ouvre une voie intéressante, dans la mesure ou Québec solidaire ne tombe pas dans le même piège que le Parti québécois en subordonnant à l’objectif de la souveraineté ses orientations politiques et sociales plutôt que l’inverse. En prônant la mise sur pied d’une Assemblée constituante, Québec solidaire ouvre la porte à une solution originale de la question nationale dont la nature pourrait être déterminée par un vaste débat démocratique permettant d’élaborer le type de rapports politiques et constitutionnels que le Québec voudrait avoir avec le reste du Canada en priorisant les intérêts économiques des travailleurs et de l’ensemble des citoyens, en somme, en élaborant sa politique nationale en fonction d’un projet de société progressiste qui ne répondrait plus au dictat de l’Establishment économique et de la droite néolibérale.