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Opinion Scène québécoise

Injonctions massives : perversion de la justice et des droits

L’article 40 de la Charte des droits et libertés prévoit que  » Toute personne a droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, à l’instruction publique… – 1975, c. 6, a. 40. » L’article se termine par le mot « gratuite » que je n’ai pas inclus dans la citation car ce n’est pas l’objet de ce billet. Je ne m’arrêterai ici que sur le principe du « droit à l’éducation » car c’est de ce droit dont il est question lorsque les juges pervertis, chacun à leur tour, accordent des injonctions pour briser l’actuel mouvement de grève des étudiants au Québec.

À cet article s’ajoute l’article no. 3 qui affirme :  » Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association.
1975, c. 6, a. 3. »

Professeur titulaire à la Faculté de droit à l’Université Laval, Christian Brunelle écrivait un excellent article récemment démontrant comment les injonctions en série contre les étudiants constituaient une perversion du droit fondamental au profit du droit contractuel (et commercial). Le droit d’association et de représentation collective d’un groupe de personnes est un droit fondamental. Lorsque Jean Charest et Line Beauchamp affirment que les étudiants en grève ne représentent pas la majorité qui elle, a décidé de poursuivre ses études, tous les deux nient les principes et la mécanique de la démocratie. D’ailleurs si on suivait leur raisonnement, le gouvernement Charest lui-même qui s’est fait élire avec un pourcentage de 42% à l’intérieur d’un taux de participation de 57%, serait illégitime.

En opposant le droit contractuel individuel (pour le gouvernement l’accessibilité n’a rien à voir avec les principes de la Charte des droits mais se résume au droit d’ouvrir une porte de collège) au droit fondamental (qui concerne les politiques d’accès à l’éducation), ce n’est pas qu’au droit d’association que les juges s’attaquent. Ils s’en prennent aussi au droit fondamental à l’instruction publique qui est au coeur des revendications étudiantes et non par la hausse des frais de scolarité qui entraînera nécessairement plus de sélection et de discrimination sur la base de la capacité de payer.

Une question de volonté politique

En cherchant à dépolitiser le conflit étudiant par des injonctions sans limites, le gouvernement ne fait que poursuivre son idéologie néolibérale dont l’objectif ultime est de soustraire les grands choix politiques de la société à la population pour les soumettre aux besoins de la finance et des grandes corporations.

Est-ce à dire que la lutte étudiante est perdue d’avance. La victoire partielle du mouvement étudiant chilien dont le conflit dure depuis plus d’un an, nous dit le contraire. Le gouvernement chilien vient de retirer le financement des études des mains des grandes banques. Il prendra directement à sa charge ce financement tout en haussant les impôts des grandes corporations pour y arriver.

Jean Garon, ancien ministre de l’Éducation au Québec publiait lui aussi son opinion sur la manière dont il s’est pris par le passé pour maintenir le gel des frais de scolarité. Dans son analyse , Jean Garon démontre que non seulement le gel des frais de scolarité est toujours possible mais qu’éventuellement on devrait arriver à la gratuité de l’enseignement. Tout est une question de choix et de volonté politique.