Le conseil national de QS
UNE COUVERTURE JOURNALISTIQUE MAL FICHUE
mardi 3 mars 2009, par Paul Cliche
Ayant couvert le conseil national de Québec solidaire, qui s’est déroulé à
Québec du 27 février au 1er mars, les courriéristes parlementaires du
Devoir et de The Gazette ont fait passer au second plan les discussions et
les décisions prises par les délégués pour mettre plutôt en vedette, dans
leurs articles publiés le 2 mars, le fait que le député Amir Khadir se soit
absenté durant ces assises.
Ce dernier, d’origine iranienne comme on le sait, a en effet participé à
une activité de l’Association des étudiants iraniens de l’Université de
Toronto, samedi le 28, après s’être adressé aux militants de son parti et
avoir fraternisé personnellement avec eux lors de la séance d’ouverture du
conseil vendredi soir le 27.
« Khadir rate le conseil national » déplorait même Le Devoir dans une
manchette de page 1. Le journaliste Antoine Robitaille a consacré plus de
60% de son article à ce fait divers laissant entendre que le député de
Mercier ne s’intéressait pas aux débats et snobait les militants. L’article
de The Gazette était de la même eau.
Ce festival de la désinformation s’est poursuivi dans La Presse, mardi le
3, alors que la chroniqueuse Lysiane Gagnon a continué à s’en prendre au
député de Mercier pour cette absence. Cette dernière en a même profité pour
reprocher à M. Khadir d’avoir donné rendez-vous à une journaliste dès 8h15
le lendemain matin de la journée du scrutin plutôt qu’à une heure plus
décente. Mme Gagnon ignore-t-elle que le nouveau députés devait alors se
rendre rapidement travailler à l’hôpital Legardeur dont il avait dû
s’absenter pendant la campagne électorale ? Mais toujours aussi ineffable
cette dernière a commenté méchamment : « Le besoin d’être dans le spotlight
doit être vraiment très fort chez cet homme-là ! ».
Une autre tactique est de plus en plus fréquemment employée par certains
journalistes : tenter d’opposer les deux porte-parole du parti, Françoise
David qui n’a pu se faire élire dans Gouin et Khadir qui l’a été dans
Mercier. Voici un autre extrait de la chronique de Mme Gagnon qui
l’illustre bien : « On comprend qu’il (Khadir) ait trouvé plus intéressant
d’être en vedette à Toronto (plutôt) que de se contenter d’écouter sagement
les interventions des militants de son parti pendant deux longues journées
en étant flanqué, par-dessus le marché, d’une coprésidente à laquelle il
aurait tout de même dû céder le crachoir de temps à autre ».
Ce ton journalistique, cynique et persifleur, est à la mode depuis
plusieurs années sur la colline parlementaire québécoise. Il contribue
beaucoup à maintenir la morosité ambiante dans les cercles politiques qui
déteint maintenant dans l’ensemble de la population. Au lieu de rapporter
correctement et de commenter de façon pertinente le contenu des politiques
mises de l’avant par les différents partis, on s’arrête souvent à des
aspects superficiels de l’actualité en s’efforçant d’écorcher la
personnalité des politiciens qui les préconisent et en ne se privant
surtout pas de leur faire des procès d’intention si les circonstances le
permettent.
Un nouveau parti de gauche idéaliste comme l’est Québec solidaire, dont le
programme se démarque des partis traditionnels, constitue certes une cible
de choix pour ceux et celles qui pratiquent ce genre de journalisme qui se
veut ‘cool’, mais qui traduit souvent leur incompétence professionnelle,
leur paresse intellectuelle ou leurs préjugés.
PAUL CLICHE, ex-courriériste parlementaire du Devoir, membre de Québec solidaire